La calebasse est un objet vénéré. Elle est comme deux frères que seul un instrument tranchant peut désunir. Elle symbolise l’union, la cohésion, la solidarité. Elle joue un rôle important dans notre société. Elle est sollicitée dans les cérémonies de mariage, de baptême, de circoncision, de décès, et autres. Avant que la nouvelle mariée ne regagne le toit de son mari, on la fait assoir la veille, au soir, sur unsagui en roseaux pour laver sa tête avec l’eau de calebasse, et la débarrasser du gnama ou pêché enquis au cours de sa vie juvénile. La calebasse fait partie du trousseau de mariage de la jeune fille. Dans certains milieux, durant les nuits de noce, les femmes tapotent sur des calebasses qu’elles renversent dans des baignoires remplies d’eau. C’est le Dji dounoun. Quand un grand officiel arrive dans une localité, pour l’accueillir, généralement, on remplit de colas, de lait, de mil, d’arachide ou de niébé, etc, selon la coutume, une petite calebasse, joliment tenue par une fille, pour souhaiter à l’ illustre hôte la bienvenue. A l’aide d’une calebasse, la ménagère malaxe habilement le couscous associé à la poudre de feuilles de baobab pour le ramollir. Une multitude de petites boules de bouillie à base de mil,moni courou, sont formées à partir de la calebasse. Aussi, pour voyager, les femmes mettaient leurs affaires dans des calebasses qui leur servaient de valises. Les hommes eux, portaient leurs baluchons en travers l’épaule.
Malgré son utilité incontestée, il faut reconnaitre que la calebasse est entrain de disparaître. De nos jours, la tasse en plastique ou en inox est plus utilisée par la ménagère. Les raisons fondamentales évoquées portent sur la fragilité de la calebasse, et surtout les difficultés liées à son entretien. Il faut rincer quotidiennement l’intérieur de la calebasse avec un morceau de pierre rugueuse ou avec le tami, un objet constitué de fils minces et durs empaquetés, conçu pour le lavage des ustensiles de cuisine.
Lallé Diarra, résident à Bougoudré Niandé, habillée en dampé noir, déteste la calebasse qui peut s’effriter à tout moment avec les enfants. D’ailleurs, nous les maures, nous ne connaissons pas la calebasse. Chez nous, c’est le counan, un récipient fabriqué par les forgerons avec du bois de N’guélé.
Bakary KONATE, notable à Sansankidé, se souvient de son parcours. L’homme déclare que lorsqu’il était encore jeune, ils allaient, lui et ses camarades du village, jusqu’à à Diombogou Maréna, dans le cercle de Yélimané, après les récoltes, pour s’adonner au travail de calebasses. Interminablement, on les fendait en deux et dégageait l’intérieur à l’aide d’un couteau. Après ce travail manuel, on laissait au soleil les calebasses pour les faire sécher durant quelques jours.
A Foutougou, commune rurale de Lakamané, la culture du calebassier est toujours pratiquée. Dans notre village, explique Sékoro, rattachée à la tradition, aucune nouvelle mariée, ne peut franchir le portail de son mari sans la présence de calebasses dans ses bagages.
La vieille Bintou cousait des calebasses dans son village. Son travail était apprécié par toutes les femmes. Si la vieille cousait une calebasse, même une infime goute d’eau ne peut s’infiltrer, racontaient les femmes autour du puits. Cette activité lucrative permettait à la pauvre femme de gagner de petites pièces de monnaie qu’elle offrait gracieusement à ses progénitures. Avec l’abandon de la calebasse par bon nombre de femmes, la vieille s’est vue désœuvrée.
Selon Fatoumata, c’est à cause de la paresse que les femmes n’aiment pas utiliser la calebasse. Cette dame a remplacé toutes ses calebasses par des tasses en plastiques qui sont abondantes sur les marchés.
Le degré de propreté d’une femme, soutient une ménagère, se mesurait par l’état dans lequel se trouvaient ses calebasses. Si vous rentrez dans une maison, poursuit-elle, et que vous voyez des calebasses sales, ne cherchez pas loin, les femmes qui s’y trouvent manquent d’hygiène.
Houlèye à Débo Massassi conserve jalousement ses semences de calebasse qu’elle compte semer.
Lamine d’ajouter en ces termes « On partait jusqu’à Foulabougou, dans le cercle de Kita, pour transporter des calebasses avec nos charrettes. Le trajet durait 2 à 3 jours. On traversait le baoulé qui pullulait de bêtes sauvages ».
Bamody, tire profit de son commerce de calebasses, même si le nombre de ses clients a considérablement diminué. Il peut réaliser des recettes de 5000 à 7500 F CFA par jour.
Ce vieux conservateur aime tout sauf les récipients en fer. Car d’après lui, depuis que les gens ont commencé à manger ou à boire avec le fer, leur cœur s’est endurci.
Le Secteur de l’agriculture de Diéma, à travers son chef secteur Aguibou B. BAH, encourage la culture du calebassier dans le cercle, compte tenu de la disponibilité des terres cultivables, et son rôle dans la protection de l’environnement, contrairement au plastique non biodégradable ayant des effets néfastes sur notre écosystème. La culture de la calebasse contribue également à améliorer les conditions de vie des populations locales.
Signé Ouka BA( correspondant à DIEMA)